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Quelques lectures pour la fin de l’année 2016
Dans une semaine, tout juste, nous nous apprêterons à nous rendre, sous la neige et munis de lanternes, qui à la messe de minuit, qui à quelque repas bien arrosé en compagnie de personnes chères. Que mettrez-vous dans votre hotte ? Comme tous les ans, voici en guise de suggestions quelques rappels de cette rentrée…
Éric Faye, Éclipses japonaises (Seuil)
L’auteur de Nagasaki a rapporté du Japon ce livre qui évoque le destin des personnes enlevées puis retenues en Corée du Nord dans les années 1970 et 1980. Sans négliger les aspects romanesques et émotionnels de l’histoire, Éric Faye l’imprègne du fantastique discret qui lui est cher et l’inscrit insensiblement dans la tradition des grands mythes.
Andreï Guelassimov, Les Dieux de la steppe, traduit du russe par Michèle Kahn (Actes Sud)
L’histoire d’un petit garçon admirateur de l’Armée rouge, dans un village de Sibérie, vers la fin de la Seconde Guerre mondiale. Et celle d’un prisonnier de guerre japonais, expert en herbes médicinales, qui finira par tenir lieu de père au premier… L’auteur de La Soif fait le portrait triste et désopilant d’un monde où règnent la violence, la misère, le désir frénétique de vivre.
Claudie Hunzinger, L'Incandescente (Grasset)
L’auteure d’Elles vivaient d’espoir revient au passé maternel dans ce livre qui se donne comme le deuxième d’une trilogie en devenir. Il s’agit ici de Marcelle, avec qui la mère de Claudie Hunzinger connut une brève et lumineuse histoire d’amour entre les deux guerres. L’écrivaine sauve de l’oubli des jeunes filles que la vie a « stoppées net ». Mais, comme toujours, son vrai sujet demeure l’être au monde, dans l’équilibre fragile que lui prête l’écriture.
Simon Liberati, California girls (Grasset)
Ce sont les « girls » de Charles Manson, celles qui, en 1969, assassinèrent, entre autres victimes, Sharon Tate, la jeune épouse de Polanski. Avec les moyens du roman, et en virtuose, Simon Liberati nous fait partager quarante-huit heures de la vie de ces créatures qu’il rend humaines sans atténuer leur monstruosité. Portrait en négatif d’une époque fleurie, et plongée dans le monde de l’absurde et de la mort.
Gilles Sebhan, La Semaine des martyrs (Les Impressions nouvelles)
Ces martyrs, ce sont ceux de la révolution égyptienne de 2011. Le narrateur les côtoie dans les rues lors d’un premier séjour au Caire. Il rend ensuite visite à leurs familles, avec Denis, son ami photographe, dans le cadre d’un travail de mémoire consacré à ces jeunes morts. Exotisme, désir, politique… Gilles Sebhan entrecroise ces fils, en une méditation subtile et sans concession sur ce qui les rapproche ou les oppose.
Marie Sizun, La Gouvernante suédoise (Arléa)
Marie Sizun plonge dans l’histoire de ses ancêtres franco-suédois. Et ressuscite son arrière-grand-mère, la fragile Hulda, son arrière-grand-père Léonard, Livia, la mystérieuse gouvernante du titre… Par la grâce d’une écriture toute en finesse, l’auteure du Père de la petite éveille une étrange empathie avec ces êtres disparus, et se peint elle-même dans le double portrait de ses héroïnes.
Colm Toibin, Le Testament de Marie, traduit de l’anglais par Anna Gibson (10-18)
La femme du titre est bien celle à qui chacun pense… Dans un long monologue, elle livre une vision assez peu catholique de la vie de ce Fils qui aurait mieux fait de rester à la maison. Avec un émouvant portrait de femme, le romancier irlandais livre une méditation profonde et originale sur la façon dont se racontent toutes les histoires.
Une adaptation théâtrale du roman de Colm Toibin sera à l’affiche de l’Odéon au printemps 2017. Dominique Blanc y jouera le rôle de Marie.
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